« Cette initiative compte plusieurs objectifs : connaître les travaux de recherche de nos collègues; créer une plate-forme de diffusion et de débat; agir comme levier pour des collaborations; intégrer la relève; et faciliter les liens. En résumé, il s'agit de renforcer la culture de la recherche et création au Campus en toute collégialité », a soutenu le vice-doyen à la recherche, Hassan Safouhi.
Comme le fait remarquer le doyen du CSJ, Pierre-Yves Mocquais, ces séminaires permettront notamment de « créer une conversation intellectuelle de nature interdisciplinaire et informelle qui alimente et élève la vie de l'esprit au Campus Saint-Jean et de trouver des points de recherche communs ou des intersections thématiques pouvant mener à des projets communs ».
Hassan Safouhi s'est réjoui de la réponse de ses collègues. « Il s'agit d'une occasion pour partager entre nous ce qui nous passionne et je suis heureux de constater que le programme de l'année est déjà complet », soutient le professeur Safouhi.
C'est Anne-José Villeneuve, professeure adjointe de français et de linguistique, qui a eu l'honneur de lancer cette série de séminaires avec une présentation portant sur La variation sociolinguistique ou comment saisir une langue en constante évolution.
Comme le souligne la professeure, la langue vivante, celle qu'on entend dans les cafés comme dans les grands salons, change au fil des générations de locuteurs qui se l'approprient. « On se plaint que les jeunes parlent mal depuis la nuit des temps », s'exclame-t-elle devant la vingtaine de personnes réunies dans la salle du Conseil du Pavillon Lacerte pour l'occasion.
Selon Anne-José Villeneuve, chez les francophones, jouer avec la langue, la corriger, est une tendance naturelle. Ses travaux sur la variation sociolinguistique en français parlé ont prouvé une chose : « Tout le monde sait qu'en général, les femmes parlent 'mieux' que les hommes. Leur façon de parler tend à se rapprocher davantage de la norme. »
Si certains chercheurs ont le regard tourné vers l'arrière, d'autres s'efforcent non seulement de décrire la variation systématique de la langue selon le contexte et les catégories sociales, mais aussi d'en saisir le changement. « Par exemple, doit-on s'étonner d'entendre une jeune francophone en milieu minoritaire dire il faullait… puisqu'on dit il faut, c'est un réflexe de régulariser la conjugaison à l'oral, de dire il faullait plutôt qu'il fallait », observe-t-elle.
Et chacun a son rôle à jouer. « N'oublions pas que si on acquiert naturellement la langue de tous les jours à la maison, on apprend la norme à l'école. S'il faut combattre les préjugés linguistiques, nous devons aussi aider les étudiants à passer au standard quand c'est nécessaire », souligne Anne-José Villeneuve.
Tout au long de sa présentation, Mme Villeneuve a présenté des exemples concrets présentant les façons dont les francophones adaptent leur langue en fonction de la formalité de la situation de communication.
Ainsi, dans un écrit très formel, on retrouvera l'exemple suivant : Les femmes auxquelles je parlais. Le même exemple, dans un format plus courant, donnera Les femmes à qui je parlais. Puis, en contexte plutôt informel, on risque d'entendre : Les femmes à qui que je parlais.
Anne-José Villeneuve reviendra ensuite plus en détail sur les auxiliaires être et avoir, ainsi que sur l'utilisation, selon le contexte, du ne dans une négation. « Il y a une certitude, nous avons une langue vivante qui varie énormément », s'exclame-t-elle.
La professeure adjointe n'entend pas s'arrêter là, puisqu'elle aimerait, en collaboration avec des collègues, étendre ses recherches au niveau de :
- La variation et l'identité nationale/régionale
- Les normes et l'éducation en milieu minoritaire
- La « correction » de l'accent
- Le vernaculaire et les services de santé en français
- Le bilinguisme et le changement linguistique
- Et bien plus